Monsieur le ministre de la Santé,

Je m’adresse à vous en qualité de directrice de la Ligue contre l’obésité.
Le sujet me paraît très urgent afin de lutter contre la propagation du Covid-19.
Les 10 et 14 mars, le Haut conseil de santé publique (HCSP) a émis un avis provisoire sur les patients à risque de formes sévères du Covid-19. Avis complété le 31 mars prenant en compte l’actualisation des connaissances disponibles.
Dans cet avis du HCSP, transmis au directeur général de la santé, figurent, parmi les personnes vulnérables, les patients présentant une obésité morbide (indice de masse corporelle > 40kg/m², mais aussi « en cas d’obésité avec IMC > 30 ».
Ainsi, sur le site du ministère de la Santé et des Solidarités, il est dorénavant demandé aux personnes présentant une obésité morbide de limiter au maximum leurs déplacements et leurs contacts. (cliquez ici)
Pour ces personnes, et en l’absence de solution de télétravail, le gouvernement ouvre la possibilité de bénéficier d’un arrêt de travail.
Pour ce faire, vous avez demandé à la CNAM, la mise en place une procédure d’arrêt de travail simplifiée en ligne pour les personnes vulnérables considérées comme « à risque » au regard du Covid-19.
Or, bien que votre ministère, dès début mars, ait compris l’impact du Covid-19 sur les patients atteint d’obésité, ces derniers ne semblent pas avoir la possibilité de bénéficier de la procédure en ligne.
En effet, sur le site ameli.fr de la CNAM, il est bien préciser que « les personnes souffrant de l’une des pathologies listées dans l’avis du HCSP et ne bénéficiant pas d’une prise en charge en ALD sont invités à contacter leur médecin traitant ou à défaut leur médecin de ville pour évaluer si leur état de santé justifie que ce dernier leur délivre un arrêt de travail.»
Cette procédure va, selon la Ligue contre l’obésité, à l’encontre de l’avis du HSCP s’agissant des personnes à risque des formes graves du Covid-19 dont font partie les patients en IMC > 30. Un avis du HSCP qui rappelle « la nécessité de respecter les mesures barrières et de distanciation physique, de privilégier les consultations à distance et de limiter les déplacements dans des lieux à risque de transmission élevée du virus comme les salles d’attente ou les établissement de santé ».

En résumé, il n’est toujours pas possible pour les personnes souffrant d’obésité (IMC > 40 et IMC>30) d’accèder à la procédure simplifiée d’arrêt de travail dérogatoire sur le site dédié ameli.fr
En effet, sur le site declare.ameli.fr, la pathologie Obésité n’est absolument pas présente, quelque IMC que ce soit.

Pourtant, les études révélées ces derniers jours démontrent largement les liens entre obésité et Covid-19 :
Un article publié le mardi 7 avril par le journal Le Monde cite les premières données du Réseau européen de recherche en ventilation artificielle (REVA) selon lesquelles, « 83 % des patients en réanimation seraient en surpoids ou obèses » Selon une cohorte réalisée au CHU de Lille, portant sur 124 patients, « l’obésité sévère (IMC 35 kg/m2) augmente considérablement le besoin de ventilation mécanique chez les patients admis en unité de soins intensifs pour le Cov2 du SRAS, indépendamment du diabète et de l’hypertension artérielle », A l’hôpital parisien de la Pitié-Salpêtrière « 83 % des personnes hospitalisés sont en surpoids ou obèses. Il s’agit dans les trois quarts des cas d’hommes et la médiane d’âge est de 63 ans », selon le réanimateur Matthieu Schmidt. Au Centre hospitalier universitaire de Nice, « parmi nos 40 patients, 95% sont en surpoids ou obèses », souligne l’anesthésiste réanimateur Hervé Quintard.
Outre cette actualité tous les jours un peu plus flagrante, la Ligue contre l’obésité enregistre quotidiennement des témoignages et des appels à l’aide provenant de personnes atteintes d’obésité qui se trouvent dans l’impossibilité de pratiquer le télétravail eu égard à leur métier.
Malgré les règles de confinement, elles sont donc contraintes de se déplacer, et ce alors même que leur état de santé les fragilise au regard du champ des pathologies listées par le Haut conseil de santé publique.
La Ligue contre l’obésité vous demande donc d’intervenir très expressément afin que les personnes souffrant d’obésité à partir de l’IMC>30 puissent, en cas de besoin et dans le cadre des mesures de non propagation du virus prises par le gouvernement, accéder au formulaire de l’arrêt de travail simplifié mis en ligne sur declare.ameli.fr
Je vous prie d’agréer, Monsieur le ministre de la Santé, l’expression de mes sentiments les meilleurs.

Agnès Maurin, directrice cofondatrice de la Ligue contre l’obésité